Ce n’est pas un tonton flingueur : Mr Bolloré ?
Ce n’est pas un flingueur : Mr Bolloré ?
L’histoire commence pourtant modestement en Bretagne, en 1981, quand Vincent Bolloré reprend la papeterie familiale des rives de l’Odet. Le jeune chef d’entreprise s’attelle au redressement de la société bigouden, spécialiste du papier bible et du papier à cigarette. Mais il a de grandes ambitions et, très vite, il est pris d’une boulimie d’acquisitions, dans une grande variété de secteurs industriels. Son appétit est insatiable, son éclectisme interroge mais son audace fascine les médias. Dans la France des années 1980 qui se laisse emporter par les vents du libéralisme, les éditorialistes ne jurent que par ce « flibustier de la finance, surdoué en affaires », « gentleman raider » ou « Petit Prince du cash-flow ». La coqueluche des médias est aussi celle des banquiers qui, de Lazard au Crédit lyonnais, lui fournissent les moyens financiers de ses raids boursiers. « Un chat ne fait pas de chiens » Retour à l’actualité du moment…Vincent Bolloré, né le 1ᵉʳ avril 1952 à Boulogne-Billancourt est un industriel, homme d’affaires, propriétaire de médias et milliardaire français. « Suite plus bas » Dixit : Claire
« Hanouna est un pilier dans l’entreprise idéologique de Bolloré »
Tapis rouge pour Zemmour, complaisance pour Le Pen, invisibilisation de Mélenchon…Un point : Le tribunal a donc refusé d’homologuer tout ce qui concerne Vincent Bolloré et deux de ses anciens bras droits en Afrique en tant que personnes physiques. La juge Isabelle Prévost-Desprez a visiblement estimé que les faits étaient trop graves pour être jugés de la sorte, c’est-à-dire en quasi-catimini, et que les peines -375 000 euros d’amende et pas d’inscription au casier judiciaire- n’étaient pas adaptées à la nature des faits. Elle a évoqué « Un trouble à l’ordre public et économique, une atteinte à la souveraineté du Togo » avant de demander un renvoi devant un tribunal correctionnel.
Ce couperet est inattendu et rarissime. Journée d’autant plus surprenante Vincent Bolloré venait de reconnaître publiquement, à la barre d’un tribunal, pour la première fois de sa carrière, des faits de corruption active en Afrique.
Hanouna, premier tireur et garde rempart assumé de Bolloré
Prenant violemment des propos vis-à-vis du député Louis Boyard qui dénonçait les agissements de l’homme d’affaires et patron de C8. Le présentateur oubliant le sens des mots justes par son rôle. A -t-il révélé la nature de la chaîne : nullement média d’opinions, mais des opinions de prévaricateur.
Plus que lamentable escarmouche entre Boyard-Hanouna. Via la chaîne, une culture d’insultes déversée par un pseudo animateur sur un député, élu au suffrage universel. La pire, la seule insulte, en vérité, qui décrit parfaitement celui qui la hurle, n’est pas « abruti, merdeux » ou tout autre anathème vomit par Cyril Hanouna.
Hanouna, engrange la vulgarité, fils de médecin qui veut en s’exprimant ainsi, représenter la voix du peuple. Se caractérise, il se définit seul, au départ des propos, par d’autres mots, à la première salve moins insultants. Phrase qui répondait à la tentative du député LFI Louis Boyard de parler des méfaits de Vincent Bolloré en Afrique. Dès que le député actuel, ayant d’ailleurs travaillé dans cette émission ne pouvait totalement ignorer les attitudes d’Hanouna, cela correspondait aussi à jeter un peu d’huile sur le feu.
En prononçant le nom du patron à savoir Bolloré
Des flots d’insultes, se sont trouvés portés à son encontre visant directement sa personne et ses anciennes fonctions sur ladite chaine, lui sont arrivés dessus comme si Hanouna voulait l’écarteler. Moins pour l’accabler que pour étouffer le blasphème en direct : « Moi Hanouna, je ne crache pas dans la main qui m’a nourri et toi tu ne devrais pas cracher dans la main qui t’a nourri »
Vocifère Cyril Hanouna. Phrase de mafieux, d’affidé dépendant, de prévaricateur. En prononçant ces mots qui lui semblaient sans doute frappés au coin de l’évidence, Cyril Hanouna n’a pas fait preuve d’esprit de corps, d’attache, pas plus corporate : Comment être corporate ? Corporate à l’excès, continuellement souriant, accepte volontiers ce que le psychologue du travail nomme le surface acting : de paraître plus en forme que ce qu’il est réellement, de dissimuler ses réelles émotions et d’ainsi faire croire qu’il éprouve celles que l’on attend de lui. Là simplement prenant le maillot « Du fayot au titre d’employé du mois voir plutôt première gâchette du patron »
Dixit Hanouna « Bolloré t’a donné de l’argent », « c’est nous qui t’avons fait député », s’est aussi insurgé le producteur de Touche pas à mon poste. Il semblerait que ce soient ses électeurs et personne d’autre qui ont fait en sorte qu’il siège à l’Assemblée nationale. Plus que surpris devant l’outrecuidance qu’il y avait à évoquer cette idée selon laquelle Vincent Bolloré serait responsable de vastes déforestations en Afrique. Par cette autre phrase l’animateur se définit en donnant sa conception des rapports sociaux et sans doute humains : on peut acheter les gens. En les payant pour un emploi qui consiste à débattre, on exige d’eux un tri dans la vérité, des mensonges par omission.
L’affrontement par des slogans remplaçant la confrontation d’idées
à l’avenir les intervenants, appointés ou pas, se rendant sur le plateau en live à l’émission d’un personnage considérant que toute vérité s’achète, deviendront complices d’une mafia. Cette chaine n’est plus en ces circonstances, un média d’opinion détenu – comme bien d’autres – par un homme d’affaires. Cela devient un média prévaricateur. Vincent Bolloré a réduit au strict minimum le nombre de journalistes dans toutes les chaînes qu’il possède. Il les remplace par des polémistes à ne pas mélanger avec de réels éditorialistes. Ils ont pour rôle de spectaculariser le débat politique tel un combat de coqs. Système donnant l’impression que, dès lors, le spectre idéologique représenté dans la sphère médiatique bollorisée est plus grande qu’ailleurs, puis donc que la liberté est gigantesque. Les radicaux, les simplificateurs sont avantagés par cette logique du clash organisé. Louis Boyard porte plainte et il a raison. En retour Cyril Hanouna dit qu’il porte plainte aussi. Son avocat entendant son client conspuant une telle annonce. Rarissime qu’un mafieux ayant publiquement discouru comme les pourchassés « Des incorruptibles » donc des voyous d’un autre temps. Hanouna s’est exprimé, clairement, avec son système de prévarication, aller, lui, face à la justice se plaindre « un élu de la République n’a pas respecté pas mon code d’honneur » ?
Découvrons un peu, l’arroseur arrosé : Une offre qui ne se refuse pas ? Le 31 mars, le groupe Bolloré a annoncé la cession de 100 % de Bolloré Africa Logistics à l’armateur italo-suisse MSC, qui dispute au danois Maersk la place de numéro un mondial du transport maritime de conteneurs, pour la somme record de 5,7 milliards d’euros. Une belle valorisation, pour des activités qui ont réalisé un chiffre d’affaires de 2,1 milliards d’euros en 2020. Le groupe Bolloré va presque entièrement quitter l’Afrique, continent où il a bâti les fondations de sa fortune, port après port, hinterlands compris. Ce depuis le rachat à Suez, en 1986, de Scac.
L’opération devrait être finalisée à la fin du premier trimestre 2023, même si elle est conditionnée « à l’obtention d’autorisations réglementaires et des autorités de la concurrence compétentes, ainsi qu’à l’accord de certaines des contreparties de Bolloré Africa Logistics », précise le groupe. Sont concernés plus de 20 000 salariés, 250 filiales, trois lignes ferroviaires et une présence dans 42 ports, dont les concessions de 16 terminaux à conteneurs et 7 terminaux dédiés au trafic roulier pour les véhicules.
« Bolloré Africa Logistics en quelques chiffres »
2,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2020- 20 600 collaborateurs- 250 filiales -250 millions d’euros d’investissement moyen annuel-3 concessions ferroviaires Bolloré Railways-2 700 km de voies ferrées -2,6 millions de tonnes de fret et 1 million de voyageurs par an. Source : Bolloré
Un même visage revient sans cesse lorsque l’on feuillette l’album photo des relations françafricaines des années 2000‑2020 : large sourire, teint hâlé, cheveux gris et regard d’acier, on reconnaît sans peine Vincent Bolloré. Il donne l’accolade au président Laurent Gbagbo sur le port d’Abidjan ou reçoit quelques années plus tard de son successeur, Alassane Ouattara, la médaille de grand officier de l’Ordre national ivoirien ; il échange une chaleureuse poignée de main avec le président camerounais Paul Biya, ou négocie encore, au côté de son fils Cyrille, avec le Gabonais Ali Bongo.
L’homme d’affaires s’affiche aussi volontiers, main dans la main et bras levés pour saluer la foule, avec le président guinéen Alpha Condé ; et, naturellement, il ne peut manquer le dîner de gala « Mille et une nuit pour mille et un cœurs », organisé à l’occasion du 20e anniversaire de la fondation Children of Africa de la première dame ivoirienne. Emblématique jusqu’à la caricature de ces réseaux qui entremêlent relations d’argent, soutiens politiques, chroniques judiciaires et relais médiatiques, Vincent Bolloré personnifie mieux que tout autre la « Françafrique entrepreneuriale ».
À suivre
Sources diverses et convergentes et des archives du Journal Le Panda
Le Panda
Patrick Juan
Durant de nombreuses années, Vincent Bolloré a en effet systématiquement attaqué – et fait condamner à de nombreuses reprises – les médias qui enquêtaient et relayaient des accusations de corruption en échange d’attribution (avec ou sans appel d’offre) de concessions portuaires en Afrique.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-instant-m/deux-journalistes-d-investigation-enquetent-sur-bollore-8332568
Réellement écouter pour mieux comprendre
Le tout n’est pas de le dire mais de savoir juste un peu
Dans « « Vincent tout puissant » aux éditions JC Lattès, Jean-Pierre Canet et Nicolas Vescovacci enquêtent sur les réseaux et les méthodes d’un des hommes les plus puissants de France.
Avec
Nicolas Vescovacci
Jean-Pierre Canet Journaliste – Redacteur en chef KM presse.
Leur enquête sur le Crédit Mutuel a fait l’objet d’une censure à l’ancienne. Un milliardaire, Vincent Bolloré, rachète une télévision, Canal+. La diffusion du film entre en conflit avec ses intérêts. Poubelle. Erreur. Le reportage est récupéré par France 3.
Scandale et audience massive là où cela aurait dû rester confidentiel. Après cet épisode, l’auteur et le producteur de ladite enquête en ont entamé une autre.
Très vaste. Mettre à jour les réseaux d’influence et les stratégies de conquête de l’homme d’affaires breton, puissamment implanté en Afrique, magnat des médias en France. Une histoire parfois très technique, parfois très cinématographique, faite de curés tradis, de poulets Thui Thui, de banquiers mentors, de présidents de la République et de grands flics.
Les brèves de l’Instant M
La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) saisit le CSA, ainsi que les responsables des commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat, tant en écrivant à la ministre de la culture pour lui demander « de faire cesser des pratiques que l’on n’a jamais vues dans l’audiovisuel ».
L’histoire est la suivante.
Voyant son chiffre d’affaires baisser, Canal+ a voulu baisser les droits d’auteurs que ses chaînes doivent payer à chaque diffusion d’une fiction, d’un documentaire, etc…
La SACD a déjà poursuivi Canal+ en justice l’année dernière.
Mais le groupe a préféré régler les droits demandés avant jugement.
La paix armée n’aura pas duré.
Le conflit est reparti.
C’est à lire dans Les Echos ce matin.
Les pistes proposées par France Télévisions pour faire travailler ensemble chaînes et radios publiques.
Notamment la création d’un nouveau rendez-vous d’information politique régional, diffusé à la fois sur France Bleu et le réseau régional de France 3. Il prendrait la forme d’un débat autour d’une question d’intérêt régional.
L’idée d’une matinale commune se poursuit : une émission hybride radio/Tv pilotée par France Bleu, sur la tranche du 7h-9h, avec des news et des services de proximité.
Un premier numéro pourrait avoir lieu à Paris.
Autre possibilité : la diffusion simultanée d’une émission en matinée (un peu plus tard), pilotée cette fois par France 3, portant sur les questions de vie quotidienne.
Dans la musique, aussi, les opérations de découverte des jeunes talents de France Bleu pourraient être relayées par France 3.
Ce ne sont que des documents de réflexion.
Le Canard enchaîné nous a appris que Vincent Bolloré était un saint homme.
Ou du moins un homme pieux. Il va à la messe tous les dimanches et se confesse deux fois par semaine auprès du père Gabriel Grimaud, curé traditionaliste.
Alors blasphémons et imaginons ce que pourrait être le dialogue entre ce grand patron et son confesseur.
Faisons-nous petite souris nichée dans un coin du confessionnal de la chapelle privée, propriété de Vincent Bolloré dans le XVIe arrondissement de Paris.
A moins que nous ne soyons planqués sous le canapé du même abbé, dans son bel appartement avec vue sur Notre-Dame (toujours selon le Canard) mis à disposition du père Grimaud par Saint-Vincent Bolloré.
Bref, écoutons la confesse du patron breton régnant sur son empire de 10 milliards.
Vincent Bolloré : — Mon père, j’ai péché.
L’abbé Grimaud : — Je vous écoute mon fils.
— Lundi, j’ai encore été à Naples en jet pour déjeuner.
— Ce n’est pas un gros péché, puisque c’est pour le bien de votre société et la prospérité de toutes les familles que vous faites vivre. Tout de même, il faudra compenser votre bilan carbone.
Parlez-moi plutôt de votre jeune ami Cyril Hanouna qui, sur l’une de vos chaînes de télévision, crée encore le scandale.
— Ce qui n’est pas juste, c’est que vous connaissez mes péchés avant même que je vous les avoue, puisqu’ils sont publics.
— De toute façon, Dieu voit tout.
― Effectivement, Cyril s’est bruyamment réjoui des records d’audience de son émission de la veille, consacrée à l’affreux assassinat de la jeune Lola par une immigrée en situation irrégulière.
— J’ai vu. L’animateur dansait avec de jeunes femmes au milieu des cotillons au son d’une musique brésilienne, célébrant de façon éhontée son succès d’audience.
— Mon père, où est le mal ? C’est une émission de divertissement. Cyril est un exubérant, et il ne faisait que se réjouir d’avoir intéressé beaucoup de monde.
Un programme de la sorte ne doit pas s’installer dans le deuil.
— Péché d’orgueil ! Tout le contraire de l’esprit d’humilité que Dieu recherche.
Les Ecritures nous disent : «L’arrogance précède la ruine, et l’orgueil précède la chute.
Mieux vaut être humbles avec les humbles que de partager le butin avec les orgueilleux.» Cyril aurait dû avoir le triomphe modeste.
— Je dois vous confesser aussi le cas d’un autre de mes employés de la télévision.
Il s’agit de Jean-Marc Morandini, en procès pour «corruption de mineurs», auxquels il a réclamé des photos intimes.
Le procureur a requis contre cet innocent présumé un an de prison avec sursis…
Je le maintiens à l’antenne car sinon, les gauchistes de tout poil qui veulent ma peau auront une victoire symbolique.
Je ne pense pas que c’est ce que Dieu voudrait ?
— Certainement pas.
Ce qu’il faudrait, c’est que ce Morandini au tempérament de feu – encore un – vienne se confesser.
Envoyez-le moi, il me détaillera ses mauvaises pensées et je jugerai de la pénitence.
Mais vous-même, mon fils, je crois que vous avez maille à partir avec la justice des hommes ?
— On m’accuse de «corruption d’agent public étranger», «d’abus de confiance» et de «complicité d’abus de confiance», «d’abus de biens sociaux» s’agissant des prestations de conseils en communication fournies par Euro RSCG, l’une de mes filiales, à propos de Faure Gnassingbé et Alpha Condé, pour leurs campagnes présidentielles au Togo et en Guinée, et de prévarications diverses afin d’obtenir des concessions sur des terminaux des ports de Lomé et de Conakry.
— Quand même !
— Mon père, le procès est en cours, mais je vous promets que je ne veux que le bien et le développement de l’Afrique.
Ce sont nos anciennes colonies. Les juges gauchistes mécréants ne veulent rien savoir, ils sont jaloux de ma réussite et ne s’intéressent pas à tout le bien que je prodigue autour de moi.
— Soyez fort mon fils.
Promettez-moi de ne pas oubliez la prière qui vous permettra de réduire votre bilan carbone.
Et n’oubliez pas de m’envoyer votre Morandini.
Maintenant, récitons le Notre Père…
Cyril Hanouna, symptôme d’un dangereux dérèglement médiatique
Les émissions dites de divertissement, qui se sont substituées aux émissions politiques et de débats, ne peuvent qu’importer les pratiques des réseaux sociaux que sont le buzz, le clash, l’invective et l’insulte.
Au risque de menacer notre démocratie, explique une ancienne membre du CSA.
Depuis une vingtaine d’années, on assiste au foisonnement du nombre d’émissions de divertissement, jeux, télé-réalité, talk-shows, émissions de plateau…
Les formats ont évolué, nombreux se situent à la croisée des genres, comme l’infotainment qui oscille entre information et divertissement.
Ces programmes sont des marqueurs identitaires forts pour les chaînes de télé et un moyen de se différencier dans un univers médiatique fortement concurrentiel.
Dans ce type d’émissions, l’animateur est une figure déterminante, il incarne le programme et lui donne la tonalité générale.
Les programmes de divertissement occupent plus du tiers des grilles des chaînes de la TNT !
Celles-ci étaient six à composer le paysage audiovisuel français à la fin des années 80, un temps où ni Internet ni les réseaux sociaux n’existaient, elles sont aujourd’hui vingt-six à être accessibles gratuitement, entourées d’une myriade de chaînes et de médias sociaux devenus les nouveaux espaces médiatiques.
Dans cet océan de contenus et de multiplicité de vecteurs, comment faire exister son programme ?
Comment se faire remarquer ?
Si le buzz, le clash, l’invective et l’insulte sont des pratiques courantes que l’on trouve sur les réseaux sociaux, permis et renforcés par l’anonymat, ils ne peuvent et ne doivent envahir en aucun cas les chaînes de télé.
Il doit y avoir une totale imperméabilité, non pas des idées mais des pratiques.
Dérivés de la révolution technologique et d’usages, les médias sociaux sont arrivés dans un climat de crise de confiance des citoyens envers leurs institutions, sans garde-fous, ils laissent place au complotisme, à la circulation de fausses informations et aux discours haineux, ils se nourrissent de nos émotions, de nos peurs et de nos angoisses.
Dans une époque du «tous pourris»
A cette allure, ils concourent au vacillement de nos médias traditionnels entraînant avec eux notre démocratie.
C’est la raison pour laquelle les émissions dites de divertissement, qui se sont substituées aux émissions politiques et de débats, trop peu attractives pour les téléspectateurs (et donc pour les annonceurs), sont devenues au fil du temps les nouveaux espaces de délibération et de débat public.
Les femmes et les hommes politiques, toutes tendances confondues, répondent présents pour y participer.
Dans une époque très critique du «tous pourris», les personnels politiques peuvent difficilement y échapper au risque de se faire traiter de lâches ou de jouer la règle de l’entre-soi, et d’être tancés pour ne pas vouloir débattre avec des gens qui ne pensent pas comme eux.
Si on comprend bien les raisons de vouloir faire du buzz d’un côté, et l’envie d’améliorer sa popularité auprès des citoyens qui se déplacent de moins en moins dans les isoloirs, cela ne peut se faire en aucun cas au prix de la démocratie !
De l’émission consacrée au meurtre de la petite Lola (où l’animateur appelle à un procès expéditif de la principale suspecte et à sa condamnation à la perpétuité sans que justice ne soit faite) à la violente altercation avec le député Louis Boyard, la responsabilité de l’animateur doit être sérieusement envisagée.
Ces émissions ont toutes deux réuni, pour chacune, plus de deux millions de téléspectateurs.
L’invitation d’une personnalité politique sur un plateau est un exercice journalistique, et les conditions du débat et des règles doivent être posées et connues de tous les participants.
Le rôle essentiel des médias.
Saisi par la Nupes et LFI et certainement par d’autres signalements, cela revient au régulateur l’Arcom (ex-CSA), dont le rôle combien indispensable est de garantir l’exercice de la liberté de communication, de rappeler à l’éditeur sa convention signée, où s’inscrivent des obligations générales, parmi lesquelles sa responsabilité dans les contenus de ses émissions «il conserve en toutes circonstances la maîtrise de son antenne» ; «il doit assurer l’honnêteté de l’information et les programmes qui y concourent».
Cette séquence est dévastatrice sur le plan démocratique.
En plus de l’insulte, de la vulgarité et de la grossièreté, nous avons tous assisté à une absence totale d’échange.
Il n’y a eu aucune écoute de part et d’autre, ni discussion ni débat, et surtout aucun respect entre Louis Boyard et Cyril Hanouna.
Or, le débat politique doit pouvoir avoir lieu à la télévision.
Ce média conserve une force évidente à rassembler et à favoriser une forme de vivre-ensemble.
Toutes les études mettent en évidence qu’Internet favorise et renforce la polarisation des opinions et active la segmentation des publics, et que depuis son arrivée dans nos foyers, on constate une baisse de la participation électorale et de la connaissance politique.
Ainsi le soulignent Jean-Louis Missika et Henri Verdier, la parole est libre sur les plateformes mais elle ne rencontre pas de contradictions.
Or, c’est le rôle des médias que de participer à l’organisation de cet espace public, qui nécessite « l’acceptation de débattre d’un même sujet, au même moment, avec des règles définies au préalable.
La liberté d’expression et des élections libres sont des piliers de la démocratie.
La liberté d’expression a besoin de dialogue et de délibération organisés par les médias ».
La sphère médiatique traditionnelle est très violemment percutée par cette nouvelle donne.
Elle doit pouvoir réagir, s’adapter et rester attractive auprès des plus jeunes sans utiliser les stigmates des médias sociaux.
Il faut lui en donner les moyens.
Il n’y pas que Bolloré parlons-en:
Comptes de campagne de Mélenchon en 2017 : le rapport qui accable Sophia Chikirou.
La députée LFI de Paris pourrait être mise en examen pour «escroquerie aggravée» dans le cadre de l’enquête sur les comptes de la campagne présidentielle de 2017 du leader insoumis.
La justice s’intéresse à la réalité de certaines prestations fournies et à leur facturation par sa société, Mediascop.
Sophia Chikirou réussira-t-elle à échapper à une mise en examen ?
La députée de Paris, élue à l’Assemblée nationale en juin dernier sous les couleurs de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) et très proche de Jean-Luc Mélenchon, devrait être convoquée dans les semaines à venir par la justice, qui la soupçonne d’escroquerie aggravée.
Un délit passible de sept ans d’emprisonnement et 750 000 euros d’amende.
En cause : son rôle dans le financement de la campagne présidentielle du leader des insoumis en 2017, qui fait l’objet d’une information judiciaire dans laquelle plusieurs personnes sont déjà mises en examen.
Sophia Chikirou en a été l’une des prestataires les plus importantes avec sa société de communication, Mediascop (rebaptisée L’Internationale en 2019), ayant facturé plus de 1,16 million d’euros de prestations commerciales lors de cette période électorale.
Selon son compte officiel, la campagne de Jean-Luc Mélenchon en 2017 a coûté 10,67 millions d’euros, dont l’Etat a remboursé 6,03 millions en vertu de la législation sur le financement de la vie politique.
Une coquille vide.
L’implication de Mediascop dans la bataille de 2017 n’est pas contestée.
La société a contribué, avec un succès certain, à la visibilité d’un candidat qui avait – déjà – échoué de peu à se qualifier au second tour de l’élection présidentielle.
Mais les juges d’instruction chargés du dossier cherchent à savoir si les sommes perçues par l’entreprise de Sophia Chikirou correspondent aux tâches réellement effectuées.
Ils s’interrogent sur la possibilité de marges indues, de surfacturations et de prestations fictives.
Le soupçon se nourrit d’un conflit d’intérêts patent : directrice de la communication de la campagne de Jean-Luc Mélenchon, Sophia Chikirou a eu un rôle de premier plan dans la sollicitation à des fins commerciales de la société dont elle est l’unique actionnaire.
C’est pourquoi les juges ont demandé à deux experts-comptables assermentés d’éplucher les comptes de Mediascop.
Ils ont remis leur rapport – déjà évoqué par Mediapart et consulté par Libération – le 20 mai 2022. Le document aboutit à des conclusions embarrassantes pour Sophia Chikirou, en décrivant Mediascop comme une coquille vide ne vivant qu’au moment des élections, pour un seul donneur d’ordre et pour assurer des prestations dont elle n’a pas les moyens.
Contactée par Libé, Sophia Chikirou n’a pas donné suite.
A propos de ce dossier, son avocat, Me Dominique Tricaud, parle d’un «serpent de mer qui pourrait bien ne jamais se réveiller» : «Nous n’y avons jamais eu accès.
Nous n’avons donc rien à dire.»
Le conseil assure que sa cliente n’a pas reçu de nouvelle convocation judiciaire – une première, fin août, n’avait finalement pas abouti.
Caractère fantomatique.
Que montre le rapport d’expertise comptable commandé par les juges ?
Il pointe le caractère très intermittent de la production de la micro-entreprise.
«En dehors des périodes de campagne présidentielle, l’activité de Mediascop est faible, quasiment nulle ou nulle», est-il écrit.
Sur les 2,04 millions d’euros de chiffre d’affaires cumulé entre 2012 et 2018, les trois quarts ont été réalisés lors des campagnes présidentielles de 2012 et 2017.
Les autres années, la petite boutique de Sophia Chikirou a végété, avec des revenus faibles (164 858 euros en 2013, 23 002 euros en 2014, 106 760 euros en 2018) ou carrément inexistants (0 euro en 2015).
Elle n’a jamais eu d’autres clients significatifs que des structures ou des mouvements proches de Jean-Luc Mélenchon : à part ceux-là, les plus gros ont été la Fédération française d’athlétisme (pour un total de 57 000 euros) et le Comité régional du tourisme (26 000 euros), à une époque où Sophia Chikirou était associée à deux autres personnes – qui ont quitté l’aventure en 2013.
Ce constat interroge la réalité et l’utilité de Mediascop : une entreprise qui disparaît du paysage économique et ressurgit brutalement au moment des élections peut-elle revendiquer une existence réelle ?
Ou est-elle seulement conçue pour capter opportunément des financements publics ?
C’est le cœur du sujet à apprécier pour les juges d’instruction.
Comptabilité sur Word.
D’autres éléments, plus mineurs, ont de quoi interpeller les enquêteurs, comme l’absence de charges d’assurance ou le manque de moyens informatiques à la disposition de la direction de Mediascop.
Sophia Chikirou n’a pas de logiciel de facturation, faisant sa comptabilité sur un programme inadapté de Microsoft : même pas Excel, mais Word !
Ce qui explique sans doute les nombreuses anomalies relevées par les experts-comptables dans les livres de la société : report de mauvais chiffres, mauvais calculs arithmétiques, erreurs de TVA (un taux de 25 % a été parfois appliqué), libellés confus…
«Nous ne disposons d’aucune information quant au contenu précis des prestations réalisées et /ou facturées», notent par ailleurs les auteurs.
Ce constat fait écho aux tensions qui avaient enflammé en 2018 le Média, la webtélé proche des insoumis que Sophia Chikirou avait quittée avec fracas, sur des accusations de facturation bidon.
La lecture du rapport d’expertise comptable laisse l’impression que Mediascop opère, administrativement parlant, avec l’amateurisme d’une structure débutante.
En témoigne le contrat signé le 1er septembre 2016 entre la société de Sophia Chikirou et l’association de financement de la campagne de Jean-Luc Mélenchon, qui est censé régir les relations commerciales entre les deux entités.
Le document fait référence à un «barème des prestations» listant les tarifs pratiqués par Mediascop.
Or, notent les experts-comptables, «l’annexe en question n’a pas été établie», et les prix n’ont été précisés qu’après l’élection présidentielle, à la demande de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
Cette autorité indépendante a d’ailleurs sorti du périmètre de remboursement de l’Etat certaines prestations effectuées parce qu’elles n’étaient pas conformes à ce barème postérieur : il y avait une différence de 35 000 euros.
Plus généralement, Mediascop travaille pendant la campagne à marche forcée, sans établir de devis ni recevoir de bon de commande, régularisant ses interventions a posteriori.
Carences et imprécisions.
L’évidente légèreté – dans tous les sens du terme – de Mediascop n’a pas empêché la société d’afficher de très bonnes performances financières.
Son résultat d’exploitation, après deux années quasi blanches en 2014 et 2015, s’est élevé à 75 000 euros en 2016, puis à 168 000 euros en 2017.
Les experts-comptables missionnés par les juges ont calculé que son niveau de rentabilité a atteint 22 % à l’occasion de cette campagne présidentielle, contre 12 % en 2012.
Une augmentation significative qui pose question alors que les coûts de structure restaient minimes et que le recours à la sous-traitance par Mediascop a été accru entre les deux échéances.
Une situation apparemment contradictoire avec le fait de gagner en profitabilité.
Ce constat interroge sur les marges pratiquées par Mediascop dans ses refacturations à l’association de financement de la campagne de Jean-Luc Mélenchon.
Sur ce point, le rapport d’expertise admet la difficulté d’arriver à des conclusions définitives, en raison des carences et imprécisions de la documentation comptable de Mediascop, ainsi que de ses spécificités qui rendent les comparaisons avec d’autres sociétés de communication non pertinentes.
Les auteurs notent toutefois que la majorité des prestations qu’ils ont réussi à analyser ont été traitées sans ajout d’un surcoût au passage.
Il n’en reste pas moins que le doute ou le flou planent sur plusieurs centaines de milliers d’euros dépensés pendant la campagne de 2017 au profit de Sophia Chikirou.
Il serait curieux que la justice ne se penche pas de plus près sur leur usage.
L’information judiciaire en cours.
Ouverte il y a plus de cinq ans, l’enquête sur le financement de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon en 2017 est toujours en cours.
Dernier épisode en date : la confirmation, le 15 septembre, par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, des mises en examen prononcées dans le dossier par les juges. Les personnes visées – le député Bastien Lachaud, l’ex-présidente de la structure de financement de la campagne, Marie-Pierre Oprandi, et l’association l’Ere du peuple – avaient demandé leur annulation.
Sans succès, donc.
La validation du raisonnement des juges par la chambre de l’instruction renforce la probabilité d’un procès, même si la longueur de la procédure donne le sentiment inverse.
Sur le fond, il est reproché à l’Ere du peuple, association conçue pour porter les idées politiques de Jean-Luc Mélenchon, et dont Bastien Lachaud était le trésorier, d’avoir indûment facturé 440 027 euros de prestations à la campagne de 2017, notamment des emplois salariés sur lesquels l’association aurait appliqué un taux de marge compris entre 58 et 66 %.
Le but aurait été de se constituer un petit trésor de guerre en prévision des batailles politiques à venir. Plusieurs chefs d’accusation ont été soulevés : «escroquerie et tentative d’escroquerie», «prêt illégal de main-d’œuvre», «faux et usage de faux».
Présumées innocentes, les personnes visées contestent les faits.
Dans une autre affaire de soupçons d’emplois fictifs au Parlement européen, deux ex-assistants parlementaires de Jean-Luc Mélenchon ont été, eux, placés sous le statut de témoin assisté.